La situation actuelle
Beaucoup a changé dernièrement. J'ai annulé mes shifts quand il s'est semblé inapproprié de continuer à se réunir alors que d'autres pays étaient déjà en confinement et avec le regret de ne pas avoir pu s'isoler plus tôt. Un peu de bricolage dans le bâteau pour que tout soit prêt pour m'y isoler, et pour une petite semaine j'ai continué de pédaler jusqu'au studio, sachant que ça ne durerait pas. Lundi dernier j'ai dit au revoir aux plus grandes peintures et pris ce que je pouvais avec moi. Je ne vais pas mentir, il y a eu des larmes et peurs à l'idée de l'inconnu.
Cependant je suis incroyablement reconnaissante. J'ai un chez moi, avec peu mais déjà bien plus que nécessaire. J'ai la possibilité de dessiner et peindre chaque jour, d'occuper mes mains et mon esprit. Je peux ralentir au rythme de l'observation, ou me perdre dans mon Imagination.
J'ai enfin trouvé le temps de peindre l'intérieur de mon bâteau. Qu'est-ce que ça m'a relaxée ! J'ai pris le temps d'apprécier chaque recoin et j'ai pris conscience de tout ces objets qui m'ont accompagnée, depuis l'enfance, depuis plus tard, depuis la France et à travers la Manche.
Je me suis mise à peindre ces objets, l'un après l'autre, pour une ou deux heures chaque jour. J'ai attrapé un petit rouleau de fin de toile, et j'ai travaillé de droite à gauche (gauchère que je suis), en laissant une composition se former d'elle même, à mesure. Ce projet célèbre ces petits totems qui comptent beaucoup pour moi, qui m'apporte du bonheur et de la force par le simple fait de les regarder. Cela m'a également fait beaucoup de bien d'avoir un focus, un plan chaque matin. Je n'avais pas à réfléchir à ce que j'allais peindre, mais seulement à m'asseoir et le faire. J'ai terminé le rouleau hier matin, et l'ai mis de côté pour qu'il sèche. Cette petite peinture qui m'a aidée à m'apaiser.
Avec cette nouvelle routine vient un nouveau "studio". J'ai regroupé mon matériel d'art dans une boîte, j'y pioche ce dont j'ai besoin pour la séance et range immédiatement après. Ma table baigne dans le soleil dernièrement. Je peux aussi aller sur le toit pour dessiner, cependant j'ai déjà perdu une ou deux pastels dans le canal... Mon couloir est devenu une station de séchage. Je suis soulagée de travailler naturellement petit, comme si j'avais anticipé que ça se révélerait très pratique. Je fais attentions aux émanations toxiques, comme ce studio est aussi ma chambre. Heureusement je n'utilise dans tous les cas quasiment jamais de solvant, et à cet égard la gouache est encore plus parfaite.
Je me sens chanceuse, et en suis reconnaissante.