A Painted Touch of Life

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une expo à 2
12 nouvelles peintures pour Suzy
et quelques pensées ci-dessous ~


En mai 2018 j’ai rencontré Inma Garcia-Carrasco, et en juillet cette amitié toute naissante nous a inspiré une collaboration pour l’année à venir : nous avons choisi une galerie, et décidé de la remplir de 10 nouvelles peintures chacune.

Je suis plus que reconnaissante de la présence de chacun autour de ce projet, de l’enthousiasme et du soutien reçus.

Voici les peintures, accompagnées de détails et pensées, merci de votre regard/lecture ♥

Répétitions - Fatima - Inspiration #1 & Inspiration #2 - Pascal - Train of thought - Sketchbook (Spoon) - Drifting Away - P and I - Sketchbook (Sleep) - Self-Portrait - Enso


(ci-dessous, cliquez sur le titre pour voir la peinture en “agrandi'“)

Quatre de ces peintures étaient de nouveau présentées lors de l’exposition collective In The Studio aux Mall Galeries du 12 au 17 août.

 


Répétitions, huile sur bois, 60x60cm

Ma maman m’a envoyé ce dessin que j’avais fait enfant : j’ai immédiatement adoré la liberté de ses lignes, une perspective qui n’a besoin d’obéir à aucune règle pour rendre ce petit monde crédible. J’ai décidé d’emprunter les traits de la jeune Suzon pour en faire une peinture.

J’ai d’abord dessiné un rapide plan sur papier que j’ai utilisé comme pochoir. À l’huile, j’ai commencé avec une palette réduite composée d’un jaune et d’un bleu, à laquelle je me suis autorisé l’ajout d’un rouge un peu plus tard. Les autres décisions sont arrivées de manière inconsciente, joyeuse et beaucoup par accident. C’était l’opportunité de jouer avec la surface, les illusions, la théâtralité et le lâcher prise.

Certains ont vu une part d’Alice au Pays des Merveilles ; je ne l’ai lu qu’ultérieurement (et bien sûr adoré !) et il s’avère que la silhouette vient sans doute, inconsciemment, de la frise qui parcourait les murs de ma chambre. J’aime imaginer que cette demoiselle est comme en retard pour la peinture, et vient d’arriver en courant, juste à temps pour être dans le champ quand l’image a été prise.

 

 

Fatima, huile sur bois, 40x40cm

L’amitié derrière ce tableau a sans aucun doute influencé mon lien envers la peinture : cela l’a à la fois facilitée (comme si elle m’encourageait à travers cette présence indirecte) et rendue plus compliquée (le défis de trouver quelque chose d’elle, au delà de l’apparence).

J’ai commencé par un croquis rudimentaire à l’huile, elle assise à l’autre bout du canapé. Je n’ai eu dans un deuxième temps que des photos comme support, ce qui s’est avéré être une stratégie assez libératrice : j’ai fait le choix de conserver beaucoup de mes observations faites durant ces 10 premières minutes. Les photos étaient utiles mais seulement en appui à la peinture.

J’ai utilisé une palette limitée composée d’ocre jaune, de bleu acier, de terre de sienne naturelle et de blanc de titane.
C’était également l’occasion de cheminer entre discipline et laisser aller, en ayant à coeur de changer ce qu’il fallait tout en s’autorisant à conserver les marques les plus spontanées.

J’ai l’impression beaucoup appris en peignant ce tableau.

 

 

Inspiration #1 ; Inspiration #2, huiles sur bois, 60x60cm

Le point de départ de cette paire est Inma et Elia, deux merveilleuses amies qui m’inspirent à travers leur art (peinture et écriture).
Visuellement, je voulais me concentrer sur des situations de contre-jour et m’essayer à des marques plus abstraites.

J’ai achevé Inspiration #1 en premier : l’approche “polygonale” est sans doute issue de mon bagage dans les métiers du jeu vidéo (utiliser des triangles et aplats me vient naturellement). Le coin en bas à gauche est resté un inconnu pendant un moment, jusqu’à ce qu’il devienne un écho du second tableau.

Inspiration #2 était davantage une bataille comme vous pouvez le voir sur l’image “en progrès”. J’ai littéralement passé autant de temps à retirer la peinture qu’à l’appliquer. Je n’ai pas encore percé tous ses mystères mais c’était l’occasion d’essayer différentes approches.

Ce n’est pas exactement un diptyque mais relativement proche. Pour autant / et justement, je ne suis pas sûre que travailler en “pair” ou “série” soit ce qui me convienne pour le moment.

 

 

Pascal, huile sur bois, 40x40cm

Celle-ci était rafraîchissante à peindre, le temps d’un matin, d’après nature.
En la peignant, je pistais les “escaliers” (les plans successifs qui décrivent la forme, orientés tour à tour en haut, en bas, à gauche, à droite ; et qui permettent de grimper visuellement du pied en bas à gauche au dos du canapé en haut à droite).

Elle recouvre une peinture faite précédemment, d’après nature également, mais avec laquelle j’étais allé trop dans tous les sens à mon goût en matière de couleurs. Je l’ai tourné à 180°, effacé brièvement au papier de verre et entrepris cette nouvelle peinture, dans une palette de couleurs plus douce.

Je crois que les accents de couleurs qui sont restés de cette première peinture ont été bénéfiques, dans le processus et le résultat (peut-être que cela apporte une sorte de vibration et légère profondeur à cette pose).

Je suis heureuse d’avoir su me contrôler dans les accents de lumière au niveau de l’arcade sourcilière (pour tout avouer, je me suis d’abord emportée, puis me suis ressaisie grâce aux leçons apprises avec celle-ci).

 

 

Train of thought, huile et craie sur bois et toile, 80x60cm

Probablement la peinture qui a grandi sur la plus grande période de temps. Différentes peintures ont essayé de s’y installer, la palette et l’orientation ont changé à chaque fois, jusqu’à aboutir à cette image libre et composite.

Les choses ont finalement trouvé leur place lorsque je me suis autorisée à n’avoir aucun plan, si ce n’est suivre mon fils de pensées. Cela a démarré via un petit citron peint sur une chute de canvas, sans rapport au départ, qui a ensuite suggéré :
citron = jaune = manteau = souvenir de l’enfance = accès à d’autres photos envoyées par ma maman + des bouts de papier ressemblant à des trains

Et ça s’est chargé émotionnellement sans que je ne m’en rende compte.

Certaines décisions étaient purement d’ordre pratique et sont ensuite devenues une addition visuelle, d’autres étaient censées n’être que des sous-couches mais sont restées, et à l’inverse les décisions qui étaient les plus planifiées ont souvent dû être atténuées.

 

 

Sketchbook (Spoon), huile, gouache et crayon sur bois sculpté, 60x60cm

J’ai rencontré Béa à travers les Mall Galleries et elle a piqué ma curiosité en m’apprenant que son passe-temps était de tailler des bûches pour en faire des cuillères. Elle m’a accueilli un dimanche matin et j’ai fait de mon mieux pour rapporter cette merveilleuse activité en peinture.

Mes premières notes étaient en huiles bleu et marron et crayon de papier, avec aucune stratégie particulière si ce n’est démarrer en bas à droite pour la simple raison que je suis gauchère.
Béa m’a offert la cuillère qu’elle a sculptée, et expliqué les dernières étapes à compléter une fois de retour au studio (papier de verre + huile) ce qui m’a inspiré les trois natures mortes sur la gauche. Peintes en gouache, cela était techniquement intéressant sur cette surface qui ne séchait jamais réellement.

Tout ce travail autour du bois m’a encouragé à utiliser moi aussi des outils de sculpture/gravure; alternativement pour dessiner, apporter de la profondeur ou créer des textures.

En réalisant que cela ressemblait à un sketchbook, je me suis demandé si ce n’était pas artificiel de ne pas utiliser du papier directement. Je pense à présent que j’ai réussi à préserver l’immédiateté d’un sketchbook tout en enrichissant les possibilités de marques et médiums.

 

 

Drifting Away, huile et pastels sur bois, 80x60cm

Cette peinture a d’abord grandi à travers trois samedis et une superbe classe guidée par le génialissime James Bland. Le premier challenge était de peindre d’après nature, à une plus grande échelle que celle de mon confort. Mon approche de la couleur était également différente : j’ai démarré extrêmement simple et feutré, et n’ai ajouté des couleurs plus vives que petit à petit.

La fin du trimestre signifiait également que je perdais accès à la “source”, et devais donc continuer seule dans le studio. J’ai dans un premier temps essayé de continuer dans cette direction, affinant la peinture grâce à mes souvenirs. Mais cela à ses limites, et je perdais mon intérêt à mesure de “l’exercice”.

Le mur derrière elle m’avait toujours fait penser à un cadre dans le cadre, et je m’étais déjà amusée à aligner son bras avec le bas du mur. En me saisissant de pastels, j’ai pris plaisir à dériver de mon plan initial et à improviser en dessinant directement avec la couleur.
Le sentiment de dérive (le titre) est également ce que je suis amenée à vivre lorsque je modèle, glissant pensée après pensée, dans des rêves éveillés et espaces confus.

 

 

P and I, huile sur bois, 60x80cm

Je voulais peindre une rencontre, de ce superbe être humain et moi-même. Cette dernière année j’ai fait un petit paquet d’auto-portraits, mais je crois bien que celui-ci est différent, avec la peinture et mes dessins parlant pour moi.

Pascal a posé pour moi à quelques reprises, mais je me sentais (déraisonnablement) coupable d’abuser de son temps ; quand il était là je peignais rapidement, comme pour prendre des notes, et retravaillais ensuite de mémoire.

L’espace où il est assis était dans un premier temps indéfini. J’ai choisi différentes formes éparpillées dans mon studio, dont la petite peinture faite précédemment, afin de composer la partie droite de l’image.

Le petit croquis “scotché” au dos d’un tableau présente l’idée originelle, pour laquelle je m’étais utilisée comme référence. Cela m’a rendue heureuse de l’inclure à la fin, comme pour boucler la boucle et me rappeler pourquoi et comment cette peinture avait démarré.
Pas nécessairement la meilleure peinture, mais une que j’aime.

 

 

Sketchbook (Sleep), huile, pastel et crayon du bois, 120x120cm

J’ai réalisé que ce grand tableau pouvait être un équivalent de mes sketchbooks, eux-même assez grands (A3). Et je me suis souvenue en particulier d’avril 2018 lorsque j’aimais peindre des petites gouaches au milieu de la page et les entourer de dessins aux crayons de couleurs. J’ai délimité différents espaces (sous-couche blanche, transparente ou le bois brut) pour transformer la surface en portions réduites, plus simples à gérer.

En parcourant mes sketchbooks, j’ai remarqué une fascination récurrente pour le sommeil de mes amis ou les corps allongés : observer quelqu’un au repos est comme un privilège, et souvent la position horizontale et l’inhabituelle manière dont la lumière tombe sur ces visages vous donnent l’impression de les voir pour la première fois. Dessiner d’après mes dessins était comme revisiter ma bibliothèque, d’images et souvenirs amassés avec le temps.

Pour le centre, j’ai travaillé avec une modèle : une première, à l’extérieur de l’école. Une combinaison de pastels et d’huile a rendu la tâche faisable dans la journée.

En haut à gauche vous pouvez trouver bébé Suzon, assoupie et qui potentiellement rêve le reste de la scène (et peut-être même qu’elle s’est arrangée pour s’entourer du mobile étoiles + lunes)

Faute de temps pour douter, peindre ce tableau était un vrai bonheur!

 

 

Sketchbook (Self-Portrait), huile sur toile, 40x30cm

Démarrée en juillet et avec une dernière itération en décembre 2018, cette peinture est arrivé à un moment où je bloquais devant une toile, par peur de devoir y mettre quelque chose de planifié, sans place au tâtonnement.

J’ai pour réfléchi à ce qui me plaisait temps dans mes sketchbooks et décidé de peindre d’une manière similairement composite et libre.

Le tableau est désormais composé de 8 auto-portraits, peints en utilisant des miroirs. Ils ne transmettent pas vraiment de “moi intérieur” mais ils étaient plus simplement un prétexte pour peindre, peindre, et peindre.

Et c’est comme une petite collection de solutions qui m’ont aidée dans le processus: du scotch pour délimiter des cadres dans des cadres, superposer et revisiter les peintures du dessous à mesure que je peins celle du dessus…

Il était également intéressant de comprendre qu’une varieté de palettes de couleurs, de marques et de degré de concentration pouvait coexister dans une même image.

 

 

Enso, huile sur toile, 100x120cm,
peinture collaborative avec Inma Garcia-Carrasco

Quand Inma et moi avons décidé de se lancer dans cette expo, nous avons eu envie de se peindre l’une l’autre dans une toile commune. Nous nous sommes laissé le temps de faire germer cette idée afin de la démarrer au bon moment.

Suite à des croquis, nous nous sommes prises en photo du haut d’un escabeau, afin de créer sur toile une image qui n’a jamais directement existé.

Nous avons commencé les premières couches côte à côte, elle m’a peint et je l’ai peint. Je crois que peindre conjointement a été clef. Cette activité habituellement solitaire est ici devenue un beau moment d’amitié.

La peinture a ensuite alterné entre nos studios, afin que chacune ait l’opportunité de résoudre le portrait de l’autre ; jusqu’à ce que l’on se retrouve pour une ultime session à deux où tout a fini de prendre forme.

Le développement de cette peinture était une chose émouvante.

 
 
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Merci pour

votre lecture ♥

(moi, toute heureuse de présenter le catalogue de l’expo)